Le plutonium nécessaire à la réalisation d’un des deux types de Bombe A peut être obtenu en retraitant le combustible « brûlé » dans un réacteur civil. Par exemple, un réacteur nucléaire modéré et refroidi à l’eau lourde utilise des barres d’uranium. Or, une fois placées dans le cœur du réacteur, ces barres d’uranium sont exposées à des neutrons : on dit qu’elles sont irradiées. Elles se chargent en plutonium 239. Lorsque les barres sont retirées du réacteur, le plutonium qu’elles contiennent est récupéré. Il peut alors être utilisé comme combustible dans d’autres réacteurs ou comme explosif nucléaire. Ainsi, il est à peu près certain que le réacteur à eau lourde de Dimona, dans le désert du Néguev, a permis à Israël de construire plusieurs bombes A.
Début 1958, près de la petite ville de Dimona, dans le désert du Néguev, Tel-Aviv entama, avec l’aide de la France, la construction d’un réacteur à eau lourde et de quatre salles souterraines pour le retraitement. Les premiers grammes de plutonium à usage militaire furent vraisemblablement obtenus dès 1965 ; et le premier engin nucléaire fut sans doute assemblé courant 1966 (source : Jeffrey T. Richelson, Spying on the Bomb, W. W. Norton & Company, 2006, p. 240 à 242).
Inconvénient de la filière du plutonium : le réacteur qui produit le plutonium se voit comme le nez au milieu de la figure. Sa taille et sa forme (en particulier celle du dôme qui abrite la pile) sont caractéristiques. Et il est inutile de l’enterrer : un réacteur atomique, même souterrain, est trahi par sa signature thermique, puisqu’il dégage autant de chaleur qu’une ville moyenne !
Du coup, Israël dut déployer des trésors d’imagination pour dissimuler la nature réelle de de Dimona. Les Américains, dont les avions et les satellites espions avaient rapidement repéré le site, demandèrent à le visiter. La rumeur affirme qu’en 1969 les Israéliens construisirent une fausse salle de contrôle à Dimona et qu’ainsi les experts envoyés par la Maison Blanche crûrent qu’il s’agissait d’un simple réacteur de recherche.
En définitif, la seule « preuve » jamais obtenue du programme israélien furent les révélations faites au Sunday Times de Londres, en octobre 1986, par un ancien employé de Dimona, Mordechaï Vanunu. Lequel a ensuite purgé 18 années de prison en Israël. De quoi inspirer la discrétion à ses collègues…
Voici une vidéo, disponible sur Youtube, vraisemblablement reprise d’une télévision israélienne. Le présentateur affirme (c’est en tout cas ce qui ressort des sous-titres en anglais) que les photos de Mordechai Vanunu ont été utilisées pour créer un modèle en 3D de Dimona. Cette vidéo, dont les informations sont bien sûr, à interpréter avec précaution, donne cependant une bonne idée de l’importance des installations de Dimona.